C, comme curieux


Photo by Melchior Damu on Unsplash


Déboussolés, nous le sommes tous plus ou moins. Et, dans ces moments-là, la tentation est grande de se laisser aller à nos réflexes les plus archaïques. Parmi les plus répandus et puissants d’entre eux, le réflexe manichéen qui nous amène, sans que nous y prenions garde, à regarder le monde de façon binaire. D’un côté les civilisés, les responsables, les forts et les utiles ; de l’autre les sauvages, les inconséquents, les faibles et les inutiles.

Pourtant, critiquables et perfectibles, nous le sommes tous plus ou moins. Ambivalents aussi.  Et rien ne nous empêche de croire que chacun fait de son mieux à partir des ressources qui s’offrent à lui. 

Il y aura des comptes à rendre et des enseignements à tirer de la situation actuelle. Comme il faut rendre justice quand les actes sont violents. C’est certain. Mais une personne quelle qu’elle soit et quelle que soit sa place ne peut se réduire à ses actes. Et si des actes sont invités à être sanctionnés -positivement ou négativement- il me parait essentiel de se méfier de tout jugement hâtif de l’homme ou la femme qui se cache derrière. Parce que nous sommes condamnés à vivre ensemble, nous sommes invités à nous accepter inconditionnellement pour ce que nous sommes. Et non pour ce que nous faisons. 

Dès lors, avant de condamner, avant même d’avoir cherché à comprendre, prenons le temps de nous mettre à la place de l’autre. De nous imaginer son monde, sa réalité. De devoir prendre la décision qu’il a à prendre et de faire les choix qu’il a à faire en considérant l’ensemble des paramètres de la situation. En se rappelant d’où il vient et ce qu’il vit. En ressentant ce qu’il ressent. En adoptant son costume. En marchant dans ses pas. Et en habitant son temps.  Faisons cet exercice aussi bien pour le ministre en difficulté que pour le jeune récidiviste. Amusons-nous à changer de visions du monde. 

Qu’aurions-nous fait à sa place, avec son histoire, ses contraintes, ses enjeux et les ressources qui sont à sa disposition ? Sommes-nous vraiment sûrs que nous penserions différemment que lui ? Que nous ferions mieux que lui ? 

Cultivons l’empathie, je nous y invite. Et plutôt que d’honorer les uns et de bannir les autres, prenons goût aux pas de côté, aux changements de regards tout en se rappelant que comprendre ne veut pas dire cautionner. Car oui, nous sommes libres de critiquer, de confronter, de nous mettre en colère. Mais juger et mépriser engendre des murs et de la haine là où il paraitrait plus utile de construire des passerelles et de tisser les fils de nos liens à venir. 

Plus que jamais nous avons besoin les uns des autres. Aussi, je plaide pour la curiosité. De celle qui nous demande d’ouvrir grand nos cœurs et nos yeux. Une compréhension comme une voie, un chemin qui nous emmène vers une fascination nouvelle des êtres pour leur propre vie. Non une compréhension fleur bleue qui se confondrait avec la complaisance ou l’indulgence. Mais une compréhension transformatrice, profonde, une compréhension de combat pour faire vivre la fraternité et ne pas seulement la lire sur le fronton de nos mairies. Ou la convoquer de temps à autre comme une vieille amie que nous culpabilisons de ne que trop rarement appeler. 

Au moins dans un premier élan. Au moins pour essayer.

Sébastien Weill

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